La gloire des érables

En mars, il y a de ces jours sans soleil, où tout est gris; les arbres s’habillent de tous les tons de gris, même la neige toute sale est grise. Où sont passés nos paysages verdoyants? Les fleurs, le gazon, les potagers bien alignés? Et les érables flamboyants dans leurs atours d’automne? Nos saisons sont tellement différentes qu’on a l’impression de changer de planète quand on passe de l’une à l’autre.

10636550_1078955628814718_6109870604541876372_oJe reviens de prendre ma petite marche de santé… Je regardais les érables. Vous les avez remarqués au début du mois de mars? Peut-être si vous avez une érablière et que vous surveillez les signes imminents de montée de sève. Quoique, ça ne se voit pas à l’œil nu. Disons plutôt que pour le commun des mortels, à ce temps-ci, les érables, dépouillés comme les autres feuillus, ne se distinguent pas des hêtres, merisiers et autres arbres, sauf les conifères. L’érable à la fin de l’hiver est humble, sobre, même pas beau. Discret, il prépare en secret ce qui constitue l’une de nos principales richesses naturelles; cet or sucré recherché partout dans le monde!

Ce n’est pas à l’automne, quand l’érable étale ses couleurs les plus somptueuses, qu’il est le plus utile, le plus précieux, même si on vient de loin admirer sa parure. Non, la gloire des érables, c’est au printemps qu’elle éclate. Au printemps, l’érable est vraiment le roi de nos bois, on compte sur lui pour une part importante de notre économie. Au printemps, oui, quand il est tout gris, tout ordinaire, c’est le moment où il nous est le plus indispensable!

photos 8janv.2015 003Ainsi en est-il des humains. Ce qui fait la valeur d’une personne, ce n’est pas ce qui est le plus apparent. Malheureusement, les médias et tous les faiseurs de mode, cherchent à nous convaincre qu’il faut « flasher », avoir de l’audace, du panache, être drôle, sinon beau. Les mots « humilité » et « modestie » sont tombés en désuétude – on va sûrement finir par les enlever du dictionnaire. Ce ne sont pas des valeurs qu’on enseigne à l’école. Si on en juge par la popularité des photos « selfie », où la popularité se compte sur les réseaux sociaux à coup de « j’aime », ce qui importe, c’est ce qui se VOIT. Montre-moi comment tu parais, je te dirai qui tu es. Ne serait-ce pas plutôt « qui tu VEUX être »?

Les qualités de cœur comme l’honnêteté, la générosité, la sincérité, si elles sont appréciées, ne sont pas des choses dont on cause… enfin, en société. Tout le monde sait pourtant que les personnes qui sont le plus utiles dans leur milieu, leur famille, pour leurs amis, ce ne sont pas nécessairement celles qui paraissent le mieux, qui ont le discours le plus éloquent… ni même celles qui ont le plus « d’amis Facebook ». Les personnes sur qui on peut vraiment compter, ce sont celles vers qui on se tourne quand on a un service à demander, une cause à faire valoir. Celles qu’on appelle quand ça va mal et que tout est gris comme un jour de mars très laid; celles qui tendent la main et qui écoutent sans juger.

Comme les érables au printemps, ce qui fait notre gloire, ce n’est pas la beauté, la renommée, ni même la fortune. La seule gloire qui vaille la peine d’être recherchée, c’est d’être utile aux autres, tout simplement. Cette gloire-là on peut en être fier, même si ça ne nous mérite ni trophée ni médaille.

Profitez du temps des sucres si vous le pouvez!

© Madeleine Genest Bouillé, 16 mars 2016

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