Un mois qui n’en finit plus

Février n’a que 28 jours, une fois seulement tous les quatre ans, il en a 29. C’est un petit mois tout court! Pouvez-vous m’expliquer pourquoi on le trouve si long? Cet hiver surtout, j’ai l’impression qu’il s’étire à n’en plus finir!

Et là, pour « rallonger la sauce », la température a refroidi, après un doux temps où ça fondait comme au printemps. Et alors, qu’est-ce qui arrive? C’est devenu glissant partout.  Le petit chemin – dix ou quinze pas – pour me rendre à la route en avant de la maison, est tout glacé… je dois m’accrocher aux bancs de neige de chaque côté. Vous êtes-vous déjà accroché à un banc de neige?  C’est ce que j’ai fait hier soir en revenant chez nous. Il n’y avait heureusement personne pour me prendre en photo.  Ce matin, quand je suis sortie pour me rendre à l’auto, une chance mon cher époux avait rapproché le véhicule tant qu’il a pu, si bien qu’on aurait presque pu y monter de la dernière marche de l’escalier. Encore là, c’est en dansant qu’on fait ces quelques pas, en essayant de ne pas se tordre le dos. Ciel! mon dos!

Mais on est chanceux quand même, autour de nous, tout le monde a une grippe :  musculaire, intestinale, rhumatismale, quand ce n’est pas tout simplement l’influenza. On touche du bois; à date, on est « tannés », mais pas malades! Vivement qu’il s’en aille, ce mois de février! Avec tout ça, savez-vous bien qu’on est rendus au Carême! Heureusement, ce n’est plus comme quand nous étions jeunes; dans le temps, le Carême, c’était quelque chose de sérieux. Si ma mère était encore de ce monde, elle me dirait d’offrir mes problèmes de marche sur surface raboteuse et glacée « pour la conversion des pécheurs et la délivrance des âmes abandonnées du purgatoire »!

La religion prenait une place importante dans la vie de nos gens. Tout était prétexte à nous faire gagner notre ciel. Nous étions en contact avec les réseaux célestes constamment.  Nous commencions et finissions notre journée par un signe de croix… et tout au long du jour, maintes fois, il nous était donné d’offrir notre travail, nos peines et nos joies au Seigneur. Nos contacts avec le ciel étaient aussi réels que le sont aujourd’hui ceux qu’on a avec le monde entier grâce aux téléphones intelligents.

Selon nos parents et nos professeurs, rien n’arrivait pour rien dans la vie; il n’y avait rien d’inutile, car tout était comptabilisé pour notre vie future. Il me revient un vieux cantique qui m’impressionnait beaucoup, et pour cause, il s’intitule Le ciel en est le prix.  Je vous cite quelques phrases de ce chant sublime :

« Le ciel en est le prix,  Mon âme, prends courage!
Ici-bas, je gémis, le ciel en est le prix »

« Le ciel en est le prix, amusement frivole,
De grand cœur, je t’immole, au pied du Crucifix. »

« Le ciel en est le prix, conservons l’innocence
Ou par la pénitence, sauvons-en les débris »

« Le ciel en est le prix, dans l’éternel empire
Qu’il sera doux de dire : tous nos maux sont finis! »

Dans un registre plus léger et pour demeurer dans le thème du Carême, je vous rappelle ce texte d’Adjutor Rivard, extrait de Chez Nous, paru en 1935, et qui a pour titre « Le signe de la Croix ». Je résume; Monsieur le Curé revenait vers son presbytère lorsqu’il rencontre un enfant qui avait commencé à « aller au catéchisme », comme on disait alors, il est accompagné de son père. Le curé demande à l’enfant s’il savait bien faire son signe de la croix. Le petit garçon, très sérieusement, trace sur lui une croix démesurée. Il commence : « Au nom du Père », presque à la nuque; « et du Fils », sa main descend jusqu’aux genoux, il décrit ensuite les deux bras : « et du Saint-Esprit », d’un geste très large jusque derrière ses épaules. Le Curé sourit et dit au père : « C’est bien, ton gars sait son signe de la croix, même s’il le fait un peu grand ».  Le père répond : « Voyez-vous monsieur le Curé, le signe de la croix, par les temps qui courent, ça refoule toujours en vieillissant. »

Avec tout ça, savez-vous bien qu’il ne reste que 11 jours en février… Et puis, quand mars arrive, veut, veut pas, ça finit par sentir le printemps!

À bientôt donc!

© Madeleine Genest Bouillé, 17 février 2018