Vénérable… et indispensable

facadeLe 10 septembre prochain, le Couvent de Deschambault fêtera ses 155 ans, je crois donc pertinent de lui décerner le qualificatif de « vénérable »! L’Histoire nous raconte que « l’abbé Narcisse Bellenger, nommé curé dans notre paroisse en 1857, ne concevait pas sa nouvelle paroisse sans couvent. » Dans le temps, quand on voulait une église, un couvent ou un presbytère, tout le monde mettait l’épaule à la roue, la main à la pâte, et on  bâtissait l’édifice dont on avait besoin. Pas plus qu’aujourd’hui, l’argent ne poussait dans les arbres. Aussi on fit des souscriptions, des quêtes et, ce qui était chose courante, il y eut des corvées pour la coupe, le charroyage du bois de charpente et tous les autres travaux. Dans l’Histoire, on lit que « …finalement, en septembre 1861, les paroissiens de Deschambault contemplaient l’œuvre qu’ils avaient édifiée de leurs mains et de leurs biens. »  Il s’agissait alors d’une maison de pierre de cinquante pieds par trente-trois. Le toit en croupe était recouvert de bardeaux, la façade étant de pierre taillée. Dans l’album-souvenir du Centenaire, il est écrit ceci : « Le 10 septembre 1861, accompagnée de leur Mère Marcelle Mallet, les trois premières religieuses de la congrégation des Sœurs de la Charité de Québec arrivent à Deschambault. Qui sont-elles? Sœur Sainte-Thérèse, supérieure, (Célina Gingras), Sœur Saint-Louis-de-Gonzague (Philomène Boissonnault) et Sœur Marie-de-la-Visitation (Mathilde Aubut). Les religieuses habiteront le Vieux Presbytère jusqu’au 23 septembre, date où elles reçoivent leurs premières élèves, qui étaient au nombre de 50 et formaient deux classes. Huit mois plus tard, elles seront 104, dont 26 pensionnaires. Une quatrième religieuse viendra prêter main-forte, il s’agit de Sœur Marie de l’Annonciation (Célina Baillargeon), qui sera enseignante pour une troisième classe. »

Couvent de Deschambault, autour de 1950

Couvent de Deschambault, autour de 1950

En 1872, on fait une première rallonge qui n’est pas en pierre, mais en bois. En 1884, une deuxième rallonge dans le même style donne au couvent son aspect actuel. Toit mansardé, sur trois versants, vingt-quatre lucarnes, trois cheminées, un clocher. La galerie  est  entourée d’une balustrade  faite d’un treillis de bois à motifs géométriques, de style Regency. Au début, le couvent est une maison d’enseignement destinée  uniquement aux filles. Étant en milieu rural, on exclut des cours les « arts d’agrément »  pour faire place au jardinage et à l’horticulture… plus utile croit-on pour de futures femmes d’agriculteurs! Dans cette veine, en 1864, on plante  plus de 400 arbres fruitiers et on crée un immense jardin. On pratique aussi l’art culinaire. Et graduellement, la musique, le dessin, le théâtre viendront s’ajouter aux matières scolaires de base.

Extrait classe centenaire du couvent Deschambault 1961Le pensionnat recevait des élèves, non seulement de la région immédiate de Portneuf, mais d’aussi loin que l’Abitibi et de toutes les régions du Québec. On y comptait majoritairement des filles, de la 1ère à la 12e année, et aussi, à partir des années 40, des garçons, de la 1ère à la 6e année.  À l’époque où j’ai été étudiante, au troisième étage,  à part les dortoirs, il y avait trois classes, celle des 1ère, 2e et 3e années, celle des 4e et 5e années et enfin, la classe des 6e et 7e années, la 7e étant l’année du premier certificat d’études. Au 2e étage, la classe des grandes, appelée « L’Académie », regroupait les filles de la 8e à la 12e année jusque vers la fin des années 50, où on enleva la 12e année. La salle de musique est toujours au même endroit; la grande salle était la salle de récréation des filles pensionnaires et servait aussi pour les festivités. Les garçons pensionnaires utilisaient la pièce qui est à l’avant de la bibliothèque comme salle de récréation.

Jadis, les salles à manger s’appelaient des « réfectoires ». Ces pièces se trouvaient au rez-de-chaussée, celui des filles étant dans la salle dite « de pastorale », celui des garçons,  dans la salle à l’arrière du vestiaire (à côté du lavoir). Les religieuses prenaient leurs repas dans la salle au fond de la bibliothèque, la cuisine étant dans le local du Centre Internet (occupé par la CJS au cours de l’été 2016).

Page couverture de l'album souvenir du centenaire , 1961.Le Couvent a célébré son centenaire  en juillet 1961. Les dames du Conseil de l’Amicale, avec la participation des religieuses du Couvent, avaient organisé des festivités comme il était alors de mise pour une fête de cette envergure : messe solennelle, jeu scénique avec récital de la chorale des élèves anciennes et actuelles. Le jeu scénique présenté à l’extérieur avait pour titre : Phare sur la côte. C’était grandiose!

Le Couvent a été une maison d’enseignement jusque vers la fin des années 60, après la centralisation des écoles, la création des polyvalentes et des cégeps. Même après, la grande maison n’était cependant pas déserte puisque plusieurs religieuses y demeuraient encore. Quelques-unes ont œuvré dans les écoles primaires de Deschambault et de St-Marc-des-Carrières, comme enseignante, directrice et secrétaire. D’autres visitaient les malades, on se souviendra de Sœur Lucienne Bertrand qui a ouvert un premier vestiaire pour les familles moins favorisées. Et, il est important de le mentionner, l’école de musique a continué de favoriser l’éclosion des talents chez les jeunes et les moins jeunes, puisqu’on y accueillait des élèves de tout âge… tout comme aujourd’hui!

Extrait chapelle Centenaire du couvent Deschambault 1961

En 1986, pour le 125e anniversaire, une journée de festivités organisée par le Conseil de l’Amicale avait rassemblé quelques centaines d’anciens élèves. La fête avait débuté comme il se doit par une messe suivie d’un repas pour lequel on dut réquisitionner  quelques locaux en plus de la grande salle… la participation des anciens élèves avaient dépassé nos  prévisions! Une dernière rencontre a eu lieu à la fin de juin 1994, alors qu’on saluait les dernières religieuses qui retournaient à Québec. Après une messe  où  les cantiques d’autrefois alternaient avec la liturgie moderne, un hommage a été rendu à toutes ces femmes  qui, depuis 1861, ont consacré leur vie et leurs talents à l’éducation des jeunes filles et garçons. Une belle rencontre, quoiqu’inévitablement nostalgique!

En 1994, la Municipalité achetait le Couvent. On y a installé le bureau de la Fabrique Saint-Joseph-de-Deschambault, un Vestiaire qui continue l’œuvre de Sœur Lucienne Bertrand, et l’École de musique, qui porte maintenant le nom de Denys Arcand. Depuis 1995, la Biblio du Bord de l’eau occupe deux des locaux du rez-de-chaussée. Le Couvent est toujours bien vivant… et comme on peut le constater, il est indispensable à la vie communautaire du milieu.

© Madeleine Genest Bouillé, 2 septembre 2016

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