Si Deschambault est aujourd’hui salué surtout par maints photographes et artistes en arts visuels, il a jadis inspiré plusieurs auteurs. D’abord, Albert Ferland, auteur québécois né en 1872, et qui s’est fait connaître par ces œuvres : Mélodies poétiques, publié en 1893, Femmes rêvées, en 1899 et plusieurs fascicules, intitulés Le Canada chanté, entre 1908 et 1910. Dans un poème intitulé Visage du Pays dans l’aube, dont je cite un court extrait, ce poète et dessinateur autodidacte, chante les beautés du fleuve, entre Deschambault et Lotbinière :
Visage du pays dans l’aube, je te chante
Je vous aime, ô caps bleus qui semblez dans l’attente
Du baiser du jour clair et des reflets de l’eau;
Vers vous, bords endormis, vole ce chant nouveau.
Salut, clochers muets qui guettez la lumière,
Vous dont le jet d’étain pointe sur Lotbinière,
Et vous, gravement gris sur ce cap sombre et beau,
Surgis parmi les pins, clochers de Deschambault!…
Bernard Courteau, auteur dont la famille est originaire de Deschambault, a publié plusieurs livres sur Émile Nelligan, sa vie et son œuvre. Dans un recueil de poésie intitulé Les Labyrinthes, publié en 1975, il dédie « à son père » ce beau poème :
Lorsque sur Deschambault, les grands vents voyageurs
Grondent dans des brouillards que les rochers grafignent
Ou que les pluies d’hiver viennent tendre leurs lignes
Entre le phare et l’aube en de vagues blancheurs
Qui dérivent sans bruit vers la nuit des falaises
Mon village est navire et porte les antans
Gestes faits de sagesse, au sein de ses haubans…
… Inondant la batture en buissons de feu frais,
En amont des midis mon village est forêt
Où l’enfance est feuillage et les vieux sont racines.
Vers la fin du XVIIIe siècle, Charles-Denis Dénéchaud, alors curé de Deschambault, avait composé des vers qui, d’après un critique inconnu « nous donnent une description chaste et précise de ce beau paysage ». Le poème était écrit en latin selon une coutume du temps. Le critique mentionne que « ces vers furent d’abord assez mal traduits en français, mais que, finalement, on les a rétablis comme suit : »
Deschambault
Sur un mont escarpé que cent beaux pins couronnent
De leur feuillage épais, les ombres t’environnent.
La vapeur et les vents conduisent les vaisseaux
Sur un fleuve profond orgueilleux de ses eaux.
Sur toi, séjour heureux, souffle le doux zéphir
Pour t’orner, avec art, la nature conspire.
Une notice suit cette page. On y apprend que « cette traduction est due à la plume intelligente de M. Jacques Paquin, prêtre, décédé en 1847 à Saint-Eustache, Bas-Canada. »
Qui était ce Jacques Paquin, prêtre catholique et auteur? Jacques Paquin, né le 8 septembre 1791 à Deschambault, était le fils de Paul Paquin, cultivateur, et de Marguerite Marcot. Ma recherche m’a appris que c’est dans une famille de cultivateurs que Jacques a passé toute son enfance. Son père était aussi sacristain. Le jeune Jacques ayant exprimé à ses parents son désir de devenir prêtre, en bons catholiques, ceux-ci ne s’opposent pas à ce projet. Il est donc ordonné prêtre en 1814 et en 1815 il obtient la cure de Saint-François du Lac et de la mission d’Odanak qui y est rattachée. Plus tard, on le retrouve curé à Saint-Eustache durant les troubles de 1837.
Jacques Paquin est l’auteur d’une brochure intitulée Journal historique des évènements arrivés à Saint-Eustache, pendant la rébellion du comté du Lac des Deux-Montagnes (Montréal 1838).
Jacques Paquin, fils de Paul, est donc apparenté aux Paquin de Deschambault.
© Madeleine Genest Bouillé, 28 mars 2016