Je lisais quelque part que les amoureux de longue date aiment à se dire : « Te souviens-tu? » Pour les couples qui sont ensemble et qui s’aiment depuis longtemps, cette phrase est aussi importante que l’éternel « M’aimes-tu? » Elle veut presque dire la même chose. Des souvenirs communs nous rapprochent, nous font sourire; même les souvenirs douloureux sont moins pénibles, parce qu’on a quelqu’un avec qui les partager.
On a traversé les moments difficiles ensemble, on a vécu le meilleur et le pire. L’indéfectible présence de l’autre nous a soutenu à chaque étape de la vie. On a conjugué à tous les temps le verbe aimer, avec tendresse, passion, patience, humour, reconnaissance… Il y en a des choses dans ce « Te souviens-tu? »
« Te souviens-tu », c’est aussi ce qui nous rapproche quand, les parents partis, on se retrouve, frères et sœurs, sur la ligne d’en haut de l’arbre généalogique. Certains se sont mariés, ont leur famille, enfants et petits-enfants sont au centre des préoccupations. Les célibataires, plus libres, ont rempli leur vie avec diverses réalisations. On se rencontre, et au détour de la conversation, la phrase magique « Te souviens-tu? », vient abolir les années écoulées. Les souvenirs des bons et des mauvais coups, des tours qu’on a joués, même des punitions méritées, font rayonner les visages de tous ces enfants d’hier.
« Te souviens-tu? », c’est le mot d’ordre de ce mois de novembre. Est-ce à cause de son dénuement, de sa grisaille, de sa mélancolie toujours présente même quand il fait beau? C’est en novembre qu’on rappelle à notre souvenir ceux qui nous ont quittés pour toujours. Deuils récent à la douleur encore vive ou deuils anciens encore présents à la mémoire, à moins d’être très jeune, on a tous un peu de parenté « de l’autre bord » et ils sont précieux ces moments pour se souvenir. On ne doit pas les laisser passer…
© Madeleine Genest Bouillé, 22 novembre 2019