Quand j’étais enfant, je regardais longuement les images qui illustrent la chanson inédite de saint Nicolas, à la page 43, dans le premier album de La Bonne Chanson. Le saint dont on nous parle dans la chanson est encadré d’une part de l’image des trois jeunes enfants qui ont l’air de bien s’amuser et d’autre part, par celle du boucher qui se tient près du tonneau, où l’on apprend que sont entassés les pauvres enfants qui ont été tués! Je ne manquais pas d’imagination… ma mère disait que j’en avais trop! Bien avant de pouvoir lire les paroles des dix couplets de la légende, je pouvais déjà me raconter l’histoire alors que je n’en voyais que les illustrations.
Je résume aussi brièvement qu’il est possible cette légende très ancienne. Trois jeunes enfants s’en allaient glaner aux champs. Le soir tombe et les enfants frappent à la porte d’un homme qui est boucher; ils demandent asile pour la nuit. Le boucher, qui est comme on disait dans le temps « un méchant », les accueille, les tue et les met au saloir « comme pourceau », tel que précisé dans la chanson.
Sept ans plus tard, saint Nicolas passant par-là, frappe lui aussi à la porte de ce même boucher et demande à coucher. Le boucher, très convivial, accueille le saint évêque : « Entrez, entrez, il y a de la place, il n’en manque pas! » Sitôt entré, Nicolas demande à souper : « Voulez-vous du jambon? » – « Je n’en veux pas il n’est pas bon. » – « Voulez-vous un morceau de veau? » – « Je n’en veux pas, il n’est pas beau! »
Et, alors, notre saint évêque « lâche le morceau » : « Je veux avoir du petit salé, qu’il y a sept ans qu’est dans le saloir. » Quand le boucher entend ça, il prend la porte et il veut s’enfuir. Mais le bon saint Nicolas, très magnanime, l’attrape par un bras et lui dit : « Boucher, ne t’enfuis pas. Repends-toi, Dieu te pardonnera. » Et alors, Nicolas va s’asseoir sur le bord du saloir et il interpelle les enfants qui y dorment depuis sept ans : « Petits enfants qui dormez là, je suis le grand saint Nicolas! » Il étendit trois doigts, les petits se levèrent tous les trois, comme s’ils avaient tout simplement dormi. Le premier dit : « J’ai bien dormi », le second : « Moi aussi! », et le troisième : « Je me croyais en paradis! » La chanson se termine ainsi : « De tout ceci, petits enfants, vous concluez assurément, qu’il faut aimer saint Nicolas. Et que je puis m’arrêter là! ».
Qui était-il ce grand Nicolas et quel rapport avec le Père Noël? On lit dans la biographie de ce saint très ancien, qu’il vécut à Patara en Lycie (Asie Mineure), de 240 à 320. Ces chiffres varient selon les sources, mais on se situe toujours entre le premier et le quatrième siècle après Jésus-Christ. Enfin, qu’est-ce que trois siècles! On fête ce saint bien sympathique le 6 décembre dans la majorité des pays d’Europe. Détail important : étant donné qu’autrefois cette fête avait lieu au début de l’Avent, on distribuait des bonbons et des jouets aux enfants en ce jour.
Saint Nicolas… Santa Claus… il n’y a qu’une bedaine entre ces deux patriarches! Mais voilà! Saint Nicolas ne connaissait pas les « hot dogs »! Il est cependant plausible qu’on lui attribue le fait qu’il soit l’ancêtre du Père Noël. Surtout que c’est aux États-Unis qu’il est devenu le bonhomme bedonnant vêtu de rouge, qu’on connaît maintenant. Et ce qui rapproche encore plus notre grand saint du Père Noël, c’est que tout comme ce dernier, Nicolas aimait beaucoup les enfants!
Moi, je raffole des légendes!
© Madeleine Genest Bouillé, 29 novembre 2017