Deschambault en fête

Tous ceux et celles qui résidaient à Deschambault en 2013 et avant, gardent en mémoire les festivités qui ont marqué le 300e anniversaire de fondation de la paroisse. Je précise pour les personnes qui aiment que les choses soient claires, que 1713 est l’année de l’ouverture des registres de la paroisse. Et j’ajoute pour ceux qui n’ont pas beaucoup de notions d’histoire locale que tout a commencé par une seigneurie concédée à François de Chavigny et son épouse Éléonore de Grand’Maison, en 1640. Cela se passait à Paris et M. de Chavigny et sa famille seraient arrivés, dit-on, vers 1642. Toutes mes excuses aux historiens, mais pour en venir à l’essentiel de mon sujet, je ne peux m’attarder  de long en large sur l’Histoire de Deschambault, aussi intéressante soit-elle. Disons seulement que Deschambault doit son nom à Jacques-Alexis de Fleury D’Eschambault, époux de Marguerite de Chavigny, fille du seigneur François de Chavigny et d’Éléonore de Grand’Maison. M. D’Eschambault avait acquis la seigneurie en 1683. Pour en savoir plus long je vous suggère de lire, soit La Petite Histoire de Deschambault, de Luc Delisle, ou le livre plus récent Deschambault, d’Yves Roby et Francine Roy.

Nulle part, que ce soit dans le livre Deschambault, paru en 2013, ou dans La Petite Histoire de Deschambault éditée en 1963, il n’est fait mention d’une quelconque célébration du centenaire de Deschambault au cours de l’année 1813, à moins que j’ai sauté des passages, sans le vouloir! Cela s’explique. La paroisse était alors en pleine croissance. Dans l’ouvrage d’Yves Roby et Francine Roy, on lit que cette époque est celle « d’une économie en pleine mutation ; entre autres, la population qui était de 453 habitants en 1790, est passée à 1,486 en 1825 ». D’ailleurs, à cette époque, cent ans, c’était tout récent pour les habitants qui venaient « des vieux pays »!

A-t-on fêté le 200e anniversaire? Que je me réfère à l’un ou l’autre de mes livres d’histoire, je crois que nos dirigeants autant ecclésiastiques que municipaux avaient d’autres chats à fouetter.  Mentionnons que 1893 marque le détachement du 5e Rang, qui deviendra la paroisse de Saint-Gilbert, et en 1903, une partie du 3e rang sera annexée à la nouvelle paroisse de Saint-Marc-des-Carrières. Je glane mes informations ici et là… et je vos apprends « qu’en 1907, la voirie s’améliore, alors qu’en 1913, la Fabrique profita de l’occasion qui lui fut offerte pour faire « macadamiser » le pourtour de l’église et le chemin de la Fabrique » (Luc Delisle). Il y eut peut-être une célébration religieuse pour souligner le 200e anniversaire de notre « encore jeune paroisse ». Mais, tout ce que j’ai pour témoigner de cet anniversaire, c’est ceci : une affiche qu’on peut voir au Vieux Presbytère – si elle y est encore – sur laquelle sont inscrites les dates 1713-1913, avec quelques photos des principales bâtisses patrimoniales. Si vous en savez plus long, faites-moi signe!

En 1963 par contre, il n’était pas question de laisser passer le 250e anniversaire! C’était  décidé, on allait fêter ça en grand! Au tout début de l’année, un impressionnant comité était mis sur pied pour l’organisation des célébrations de cette fête. Il se composait d’une vingtaine de personnes, représentant les autorités religieuses et municipales, ainsi que des  bénévoles de chacun des mouvements paroissiaux.  M. Antoine Roy en était le président.  Pendant qu’Agnès Bouillé-Bilodeau travaillait à la rédaction d’un jeu scénique avec l’aide de Francine Roy pour la réalisation, son époux, Gaston Bilodeau, président de la Société Saint-Jean-Baptiste et un des principaux responsable de l’événement, faisait du recrutement pour créer une chorale mixte. Dans le même temps, notre historien local, Luc Delisle, mettait la dernière main à son livre: la Petite Histoire de Deschambault. Et pendant ce temps, Jean-Marie Du Sault, qui souhaitait donner une seconde vie au Vieux Presbytère, préparait un « Musée-souvenir », à visiter au cours de l’été 1963.

Quelles belles fêtes… dont j’ai malheureusement peu de photos. Dans un numéro du  journal L’écho de Portneuf, on lisait dans un texte publicisant cet important anniversaire que « toutes les associations et regroupements sociaux, religieux ou culturels de Deschambault seront appelés à participer à l’élaboration du programme des cérémonies officielles et des manifestations populaires reliées à l’événement. » Je vous fais part du programme des célébrations qui eurent lieu du 2 au 5 août inclusivement, tel que rédigé dans l’album-souvenir :

Vendredi 2 août :
8h00 : Ouverture des Fêtes. Les cloches sonneront pendant 5 minutes.
8h15 : 1ère présentation du Jeu scénique – Chorale du 250e à la Ferme-école de Deschambault.

Samedi 3 août :
1h 30 : Festival de la Jeunesse, sur le Terrain de Jeux.
5h00 : Messe à la Grotte  sur le Cap Lauzon
8h00 : Soirée Canadienne –  Chorale du 250e à la Ferme-école de Deschambault
Invitation à nos sexagénaires et à toutes les familles de St-Alban, St-Marc, St-Gilbert et Portneuf.

Dimanche 4 août :
10h 00 : Grand’messe solennelle à l’église
11h 00 : Photo-souvenir – Façade de ‘église
11h 30 : Réception au Manoir de La Gorgendière
12h 30 : Banquet – à la Ferme-école de Deschambault
3h00 : Dévoilement du Monument commémoratif, Démonstration « Patro », Terrain de la Fabrique
8h00 : 2e présentation du Jeu scénique – Chorale du 250e à la Ferme-école de Deschambault
11h00 : Pyrotechnie – Sur le Cap du Couvent

Lundi  5 août :
9h00 : Messe solennelle pour les défunts : prêtres, fondateurs, religieux, religieuses et paroissiens décédés.

MUSÉE
Invitation spéciale à tous de visiter le Musée qui sera installé au Vieux Presbytère.
Heures des Visites : de 1h30 à 5h00. Samedi et dimanche.

014Savez-vous où est le « Monument commémoratif »? Du côté nord de l’église, vous pouvez voir ce monument en forme de livre, sur lequel on peut lire : « Des hauteurs du Cap Lauzon, Deschambault persévérant, maintiendra ses traditions. »

J’inclus en plus de la photo de la chorale, quelques photos du Jeu scénique,  relatant l’histoire de Deschambault et je vous en donne le programme:

  1. Cartier à Ochelay
  2. À Paris chez la Duchesse d’Aiguillon
  3. Épisode de la vie de la 1ère famille de défricheurs à Chavigny
  4. Figures marquant notre histoire au XVIIIe siècle
  5. Descente des Anglais à Deschambault
  6. Conséquences de la guerre

INTERMISSION

  1. Paisibles évocations du XIXe siècle
  2. Relations d’aujourd’hui

Je vous reviens pour parler des 275e  et  300e  anniversaires…

© Madeleine Genest Bouillé, 24 juillet 2016

La maison de nos gens

Relais de poste datant du début du 18e siècle, avant sa restauration au début des années 2000.

Relais de poste datant de 1735, avant sa restauration en 2004-2005.

Il y en avait de plus grandes;
Il n’y en avait pas de plus hospitalières…
Il y en avait d’une parure plus opulente;
Il n’y en avait de meilleure à voir…

Je ferme les yeux et je la revois encore :
La maison de nos gens, blanche,
Dans la lumière, sur le chemin du roi…

 Chez nous, Adjutor Rivard, 1914

Ancienne maison du percepteur des rentes seigneuriales, rue de Chavigny (photo: coll. privée Madeleine Genest Bouillé).

Ancienne maison du percepteur des rentes seigneuriales, datant de 1822, rue de Chavigny.

Je ne savais pas quoi lire… plusieurs livres attendaient que je veuille bien découvrir ce qu’ils avaient à dire… Nul ne me tentait. Comme on écoute avec nostalgie les chansons de notre jeunesse, on a parfois le goût de relire un vieux livre qu’on a aimé et dont on connaît des grands bouts par cœur. J’ai donc choisi un très vieux bouquin, un prix de fin d’année, reçu lorsque j’étais étudiante au couvent: Chez nous, d’Adjutor Rivard, un auteur québécois qui a écrit ce livre en 1914.  Je ne sais même pas combien de fois je l’ai relu. C’est bien écrit. Avec de belles expressions bien de chez nous! Le premier chapitre, La Maison, nous l’avions étudié durant le cours de français, je ne sais plus en quelle année. J’en avais mémorisé plusieurs passages. En le relisant, ça m’a donné l’idée de savoir combien il peut y avoir de vieilles maisons  à Deschambault. J’ai donc fait le tour de mon patelin, de mémoire.

Ancienne "salle des habitants" construite dit-on avec le bois de la 1ère église vers 1840 (crédit photo: Patrick Bouillé, coll. privée Madeleine Genest Bouillé).

Ancienne « salle des habitants » construite dit-on avec le bois de la 1ère église vers 1840 (crédit photo: Patrick Bouillé).

En 1963, à l’occasion du 250e anniversaire de la paroisse, on avait publié un feuillet sur lequel figurait la liste des résidents de Deschambault en 1890-1900, versus 1963.  Évidemment, la liste de 1963 contient beaucoup plus de noms, du fait que beaucoup de nouvelles maisons ont été bâties. Par contre, à certains endroits, comme dans les rangs, il n’y a plus de maisons sur une portion de route, alors qu’il y en avait autrefois. Ce feuillet en mains, j’ai donc tenté de refaire une liste des maisons centenaires et plus, « encore debout ». Certaines des maisons mentionnées en 1890-1900 ne sont plus là, d’autres les ont remplacées.

Maison de la veuve Grolo, datant de l'ouverture des registres de Deschambault, en 1713, à l'est du village (crédit photo: Patrick Bouillé, coll. privée Madeleine Genest Bouillé).

Maison de la veuve Grolo, datant de l’ouverture des registres de Deschambault, en 1713, à l’est du village (crédit photo: Patrick Bouillé).

Après avoir repassé la municipalité d’est en ouest et du sud au nord (territoire de l’ancienne municipalité de Deschambault, avant la fusion avec Grondines en 2002), j’en suis arrivée à trouver une centaine de maisons de cent ans et plus, ça peut même aller jusqu’à deux cents ans pour certaines constructions, et ce, dans ce qu’il est convenu d’appeler le « premier rang », avec le village. Dans les deuxième, troisième rangs et Lachevrotière,  j’en ai compté une quarantaine. J’ai fait ce travail par plaisir, je ne suis pas spécialiste dans ce domaine, mes chiffres sont donc approximatifs. Ensuite, j’ai tenté  de recenser les maisons construites avant 1760, durant le Régime Français, cette tâche étant pas mal plus ardue, je ne suis certaine que d’une dizaine de maisons. Il peut y en avoir plus. Chose certaine, quand on dit que Deschambault a su conserver son visage d’antan, il faut convenir qu’un bon nombre de ces témoins d’autrefois que sont nos vieilles demeures, se dressent encore fièrement sur le Chemin du Roy et sur nos routes de campagne.

Maison de Louis-Joseph Bouillé, probablement la 2e maison construite sur la terre ancestrale, sur le chemin du Roy (photo: coll. privée Madeleine Genest Bouillé).

Maison de Louis-Joseph Bouillé, construite sur la terre ancestrale, sur le chemin du Roy.

En regardant la liste des résidents de Deschambault entre 1890 et 1900, ce qui m’a frappée, c’est le nombre de vieilles familles dont il ne reste pas de survivants chez nous; les Boudreau, Proulx, Rodrigue, Courteau, Rousseau, Thibodeau, Bélisle, Raymond,  Guillemette, Beaucage, et combien d’autres. Par contre, on trouve encore un grand nombre de résidents actuels dont les familles étaient établies ici il y a cent cinquante ans ou plus, ce qui démontre que la population locale est quand même assez sédentaire. Pour le cas où les descendants n’occupent plus le bien ancestral, ils demeurent quand même  dans la municipalité. Il est important de mentionner que plusieurs familles occupent toujours le « vieux bien » de leurs ancêtres.

Maison Delisle, reconstruite vers 1765 et appartenant à la même famille depuis ce temps (crédit photo: Patrick Bouillé).

Maison Delisle, datant de 1765 et appartenant à la même famille depuis (crédit photo: Patrick Bouillé).

Les prénoms, ça vous intéresse? Les propriétaires étant surtout des hommes à cette époque, j’ai peu d’échantillons de prénoms féminins à la mode en 1890. Chez les hommes, donc, la faveur allaient aux Joseph, Damase, Delphis, Charles, Zéphir ou Zéphirin, Narcisse, Olivier, Alfred, Hercule, Elzéar, Télesphore, Zénophile, Nérée, Trefflé… Les prénoms les plus rares : Thurief, Marseille, Théotime, Sinaï, Alyre, Isaraël, Fortunat, Philias, Lydéric… Si vous attendez un bébé et que vous cherchez un prénom hors du commun, vous  avez le choix!

Maison Paquin, 1816, dans le 2e Rang (crédit photo: Patrick Bouillé).

Maison Paquin, 1816, dans le 2e Rang (crédit photo: Patrick Bouillé).

Pour terminer en souriant ce texte à saveur historique, j’ai trouvé dans ma liste un certain John West et un Édouard East. Il ne manquait qu’un M. North et un M. South, pour que le tour d’horizon soit complet! J’espère que mon « tour de Deschambault » vous a plu, pour ma part, j’y ai pris grand plaisir!

© Madeleine Genest Bouillé, 1er juillet 2016

N.B. Toutes les photographies sont issues de ma collection (© collection privée Madeleine Genest Bouillé).

(Rédigé à partir d’un article paru dans le journal Le Phare en 1995.)

cal.anc.2012 003Photo de couverture: la rue de Chavigny avec au premier plan la maison sise au # 103, datant de 1736, puis la maison connue comme étant celle du peintre Georges St-Pierre  et enfin, à l’arrière-plan, le moulin de La Chevrotière de 1802 (source photo: Centre d’archives régional de Portneuf).